Les extraits cités sont issus de Métamorphoses de l’âme et ses symboles, CG. Jung, Georg Editeur SA, Le livre de poche, 1993.
28.1 – Moitiés
La sexualité est le moyen naturel et nécessaire de toute vie, et tout ce qui vit a tendance à se reproduire dans un sens de conservation de l’espèce. Les plantes, les animaux vivent cela sans se poser de question (acceptons cette hypothèse de réflexion pour l’instant et sans préjuger du niveau de conscience que peut avoir toute créature…). Pour l’être humain, il en va différemment, parce qu’il réfléchit, raisonne, juge et que dans sa nature il peut aller avec ou contre les lois biologiques. La concordance entre l’instinct et la volonté ou le désir n’est pas toujours (souvent?) réalisée.
« La sexualité qui est un des instincts les plus importants, forme le fond et la cause d’innombrables affects qui, on le sait, exercent sur la langue une influence des plus tenaces. Mais on ne peut identifier affects et sexualité parce qu’ils peuvent provenir d’une quelconque situation conflictuelle: par exemple l’instinct de conservation est aussi une source de nombreuses émotions. » (p.54)
Pour Jung, même si la sexualité a beaucoup d’importance et même s’il est en accord avec un grand nombre d’idées de Freud, elle reste un facteur partiel, la moitié inférieure de la question. La moitié supérieure concerne « la création idéale au lieu de la création réelle » (p.113). La fécondité spirituelle est digne des plus hautes espérances et nécessaire pour bien des gens:
« L’attitude réservée que je pris dans la préface à ma Psychologie de la démence précoce vis-à-vis de la théorie sexuelle, tout en reconnaissant les mécanismes psychologiques indiqués par Freud, était dictée par la place qu’avait prise alors la théorie de la libido, dont la conception ne me permettait pas d’expliquer par une théorie unilatéralement sexualiste des troubles fonctionnels touchant tout autant le domaine d’autres tendances que celui de la sexualité. À la place de la théorie sexuelles des Trois essais sur la Théorie sexuelle, une conception énergétique me parut plus convenable. Elle me permit d’identifier l’expression « énergie psychique » et le terme « libido » (p.242).
28.2 – Déplacement de la libido
Chez l’enfant la libido est d’abord concentrée sur la fonction nutritive, car l’acte de téter est lié à des mouvements rythmiques permettant de prendre la nourriture. Dans cette période apparaît un autre mouvement rythmique agréable dans le domaine de la motricité ( bras, jambes, trépignement ). En grandissant, les organes de l’individu se forment, et la libido déplace l’activité rythmique vers d’autres fonctions, « le but final provisoire et partiel » étant dans la sexualité. Une part considérable de l’énergie de nutrition et de croissance se transpose en libido sexuelle, et ce passage se fait progressivement durant la plus grande partie de l’enfance. « Au cours de sa mutation, la libido entraîne avec elle des éléments de la phase nutritive dans ses nouveaux domaines d’application, ce qui permet d’expliquer les nombreuses et profondes liaisons entre la fonction de nutrition et la fonction sexuelle » (p.255).