- Libido
- Éros & Thanatos
- Théorie des pulsions
16.1 Libido
Pour Freud il existe plusieurs types d’énergies psychiques, avec des qualités différentes. Ses recherches l’ont mené à distinguer l’énergie qui régit les phénomènes psychiques de la vie sexuelle: l’énergie libidinale, la libido.
Bien que non mesurable, la libido est une notion qui permet de définir le transfert ou la fixation d’énergie sur tel ou tel objet (de préférence sexuel, mais pas forcément). La libido peut se fixer ou se retirer d’une représentation et passer d’un objet à un autre, elle dirige l’activité sexuelle de l’être humain. Le plaisir est conçu comme une extinction partielle et temporaire de la libido. Lorsque la libido est fixée sur un objet sexuel, elle est appelée libido d’objet. Lorsque suite à des conditions externes ou internes elle se retire de l’objet, elle « retourne » dans le moi (cela sous-entend qu’elle en vient et cela renvoie à la notion de narcissisme que Freud développe à partir de 1910 – une note ajoutée aux Trois essais sur la théorie de la sexualité- et qu’il précise en 1914 en publiant un article en 1914.), la libido est alors appelée libido narcissique.
16.1 Théorie des pulsions
Définition du dictionnaire Laplanche et Pontalis :
Allemand = Trieb ; Anglais = instinct, drive ; Espagnol = instinto ; Italien = istinto, pulsione ; Portugais = impulso, pulsão.
Processus dynamique consistant dans une poussée (charge énergétique, facteur de motricité) qui fait tendre l’organisme vers un but.
Selon Freud, une pulsion a ses sources dans une excitation corporelle (état de tension) ; son but est de supprimer l’état de tension qui règne à la source pulsionnelle ; c’est dans l’objet ou grâce à lui que la pulsion peut atteindre son but.
Quand Freud parle d’Instinkt, c’est pour qualifier un comportement animal fixé par l’hérédité, caractéristique de l’espèce, préformé dans son déroulement et adapté à son objet.
La pulsion est définie comme « un concept- limite entre le psychisme et le somatique« . Elle est liée à la notion de « représentant » par lequel Freud entend une sorte de délégation envoyée par le somatique dans le psychisme ( du corps vers l’esprit).
La pulsion est définie comme une force constante qui s’exerce à l’intérieur du corps. Elle se compose d’une source (état d’excitation), d’un objet qui va permettre à la pulsion d’atteindre son but lié à la satisfaction d’un besoin ou d’un désir.
16.1.2 Pulsion d’autoconservation
Ensemble des besoins liés aux fonctions corporelles nécessaires à la conservation de la vie de l’individu (ex: faim, soif). Elles sont opposées aux pulsions sexuelles dans la première théorie des pulsions. Elles ne peuvent se satisfaire que d’un objet réel, et le passage du principe de plaisir au principe de réalité s’effectue très vite. Par ce passage, elles s’opposent aux pulsions sexuelles qui peuvent se satisfaire sur un mode fantasmatique et restées plus longtemps sous la domination du principe de plaisir.
16.1.3 Pulsion de vie, Éros
Grande catégorie de pulsions que Freud oppose aux pulsions de mort. Elles tendent à constituer des unités toujours plus grandes et à les maintenir. Les pulsions de vie, qui sont aussi désignées par le terme d’Éros, recouvrent non seulement les pulsions sexuelles proprement dites mais encore les pulsions d’autoconservation.
Elles tendent non seulement à conserver les unités vitales existantes, mais à constituer, à partir de celles-ci, des unités plus englobantes. C’est ainsi qu’il existerait, même au niveau cellulaire, une tendance « …qui cherche à provoquer et à maintenir la cohésion des parties de la substance vivante ». Cette tendance se retrouve dans l’organisme individuel en tant qu’il cherche à maintenir son unité et son existence (pulsions d’autoconservation, libido narcissique). La sexualité sous ses formes manifestes se définit elle-même comme principe d’union (union des individus dans l’accouplement, union des gamètes dans la fécondation). Le principe sous-jacent aux pulsions de vie est un principe de liaison. « le but d’Éros est d’établir de toujours plus grandes unités, donc de conserver: c’est la liaison. Le but de l’autre pulsion, au contraire est de briser les rapports, donc de détruire les choses ».
16.1.4 Pulsion de mort, Thanatos
Catégorie fondamentale de pulsions qui s’opposent aux pulsions de vie et qui tendent à la réduction complète des tensions, c’est à dire ramener l’être vivant à l’état anorganique. Tournées d’abord vers l’intérieur et tendant à l’autodestruction, les pulsions de mort seraient secondairement dirigées vers l’extérieur, se manifestent alors sous la forme de la pulsion d’agression ou de destruction (les pulsions de mort tournées vers l’extérieur. le but de la pulsion d’agression est la destruction de l’objet).
16.1.5 Pulsion d’emprise
Pulsion non sexuelle, qui ne s’unit pas secondairement à la sexualité et dont le but est de dominer l’objet par la force.
16.1.6 Théorie des pulsions
« Les pulsions ne sont pas toujours d’accord entre elles et cela aboutit le plus souvent à un conflit d’intérêt ».
La théorie des pulsions est développée dans Jenseits des Lustprinzip (Au- delà du principe de plaisir, S. Freud, 1920).
Les pulsions sexuelles se construisent par étayage sur les pulsions d’autoconservation : L’enfant a faim -> il tête le sein de sa mère pour réduire la tension -> la réduction de la tension passe par la succion et introduit une notion de plaisir.
Ce plaisir, au départ lié à la satisfaction de la réduction de tension due à la faim, est l’embryon d’un plaisir sexuel. Les pulsions sexuelles, en se séparant des fonctions d’autoconservation, vont évoluer et n’auront plus besoin d’un objet extérieur, elles deviennent auto-érotiques (développement de l’enfant jusqu’au complexe d’Œdipe entre 3 et 5 ans).
Freud observe que la tendance à la répétition est en contradiction avec la recherche de satisfaction (la répétition d’une situation difficile pour soi ou les répétitions obsessionnelles, compulsives). Cette répétition est due à une pulsion visant à rétablir un état antérieur où il n’y avait pas de tension. Pour Freud, c’est la marque du « démoniaque », d’une force irrépressible, indépendante du principe de plaisir et susceptible de s’opposer à lui, c’est la pulsion de mort qui représente la tendance de tout être vivant à retourner à l’état anorganique : « Si nous admettons que l’être vivant est venu après le non vivant et a surgi de lui, la pulsion de mort concorde bien avec la formule […] selon laquelle une pulsion tend au retour à un état antérieur ».
La pulsion de mort est postulée à partir de faits censés mettre en échec le principe de plaisir, mais en conclusion Freud affirme que « le principe de plaisir semble être en fait au service des pulsions de mort ». Cette contradiction l’a amené à distinguer le principe de plaisir et le principe de Nirvâna.
Le principe de Nirvâna est compris par Freud comme principe économique (quantité d’énergie considérée) de la réduction des tensions à zéro et qui « …serait entièrement au service des pulsions de mort ». Quant au principe de plaisir, il « représente l’exigence de la libido », et est plus dans le qualitatif que l’économique.
L’introduction de la notion de pulsion de mort est liée à une réflexion sur ce qu’il y a de plus fondamental dans toute pulsion: le retour à un état antérieur. Dans la perspective évolutionniste (cf. Darwin) choisie par Freud, cette tendance régressive ne peut viser qu’à rétablir des formes moins différenciées, moins organisées, n’ayant plus à la limite de différence de niveau énergétique.
La pulsion de vie est alors définie comme mouvement inverse, c’est à dire comme l’établissement, le maintien, et l’accroissement de formes différenciées, organisées à différents niveaux énergétiques. Le chaos inorganisé devient le cosmos organisé. Le chaos est dans son éthymologie grecque « une faille, une béance », il est décrit comme le commencement confus de toute chose, une masse enchevêtrée. Le cosmos est défini dans l’éthymologie grecque comme l’univers organisé.
Le problème qui se pose pour les pulsions de vie par rapport à un retour antérieur, est d’identifier quel est cet état antérieur?…
Freud, n’ayant pas une réponse démontrable, se réfère au mythe d’Aristophane dans le Banquet de Platon : L’accouplement sexuel chercherait à rétablir l’unité perdue d’un être originairement androgyne, antérieur à la séparation des sexes.
Ainsi donc l’état antérieur serait un être androgyne…
Dans la perspective évolutionniste pourquoi pas? Les êtres humains descendent des primates qui descendent des dinosaures qui descendent d’êtres aquatiques qui descendent d’êtres monocellulaires, et il existe des formes aquatiques bisexuées, et les cellules se divisent de manière asexuée…
Il est aussi intéressant de comparer le mythe d’Aristophane à un passage (Métamorphoses de l’âme et ses symboles, Chap. III « La métamorphose de la libido C.G. Jung) des anciens écrits védiques, issu de l’Upanishad Brhadâranyaka (trad. Deussen, in « Die Geheimlehre des Veda », 1909, p23). Cette citation par Jung est stupéfiante de similitude : « un être premier et universel hermaphrodite (bisexué) est à l’origine de l’humanité par division… »
( voir le thème Jung/ Énergie).